Cet article fait suite à un article précédent intitulé « Mon cours est-il épicène?« . Le 6 octobre dernier, la Fédération des associations d’étudiant-e-s de l’Université de Lausanne (FAE) a organisé une journée de l’égalité avec plusieurs actions. La journée s’est clôturée par un mini-colloque où trois intervenant-e-s ont présenté des recherches à propos de cette thématique. Voici un bref résumé des quelques notes que j’ai prises.
La perception de ce que l’université peut apporter comme compétences pour la vie professionnelle est très différente selon que l’on est un homme ou une femme. Par exemple, selon une étude de l’Université de Genève, les hommes préfèrent les connaissances scientifiques alors que les femmes sont davantage attirées par l’ouverture d’esprit caractéristique de l’université. D’autre part, si les femmes sont globalement plus performantes dans leurs études universitaires, cet avantage ne semble pas se concrétiser lorsqu’il s’agit de trouver un emploi ou de poursuivre une carrière à l’université (davantage de femmes s’inscrivent à l’université mais ceci ne se traduit pas par davantage de femmes que d’hommes qui deviennent professeure). Les femmes recherchent dans les études universitaires un intérêt pour un domaine d’étude ou un épanouissement personnel alors que les hommes visent plutôt un emploi prestigieux et un bon salaire au sortir de leurs études.
A la fin des présentations, de mon point de vue de conseiller pédagogique, je me suis posé la question de savoir ce que les enseignant-e-s pouvaient faire en pratique dans leurs enseignements pour tenir compte de toutes ces recherches. En d’autres mots, comment rendre son enseignement sensible à la question du genre? Y a-t-il des méthodes ou une organisation qui pourrait tenir compte des différences entre les étudiantes et les étudiants?
Personnellement, lors d’un cours que j’ai donné avec Hervé Platteaux à Fribourg (Usage des technologies pour l’enseignement et les apprentissages), nous avons été observés par une collègue qui s’est penchée spécifiquement sur ces questions de genre. Par exemple, si dans l’imaginaire collectif, on s’attend à ce que les femmes soient moins habiles avec les technologies que les hommes, comment cela se traduit-il dans un enseignement? Ceci est un gros cliché, bien sûr, mais si on n’y prend pas garde, est-ce que cela a une influence? Ou est-ce que notre matériel de cours est épicène? Ou même est-ce que notre façon de nous adresser aux étudiant-e-s est épicène? Après l’observation, nous avons rempli Hervé et moi un questionnaire réflexif (PDF – 164Ko) puis nous avons eu un long entretien avec notre collègue et j’ai appris pas mal de choses sur ma façon de donner cours et sur les pistes qui sont à développer pour tenir davantage compte de la diversité des étudiant-e-s. Il se fait justement que cette année, nous avions un groupe composé uniquement d’étudiantEs!
Voici mes quelques notes prises lors de l’entretien:
- Utiliser un langage épicène à l’écrit (polycopié, dias, etc.) n’est pas une chose très compliquée. Ce blog en est la preuve 🙂 Mais c’est plus difficile à l’oral. Pourtant, selon les recherches menées dans le domaine, s’adresser explicitement aux étudiantes et aux étudiants en utilisant un langage épicène influe leur motivation et montre l’intérêt que l’on a pour chacune et chacun.
- Dans un cours, quand on cite des auteur-e-s important-e-s, on a tendance à « asexuer » les noms. Le problème est que tout le monde a tendance à penser que les chercheurs sont toujours des hommes. Mentionner également les prénoms des chercheur-euse-s et équilibrer les citations d’auteures et d’auteurs permet de mettre en valeur le fait que les femmes aussi font de la recherche. Ceci est d’autant plus vrai dans le domaine des sciences de l’éducation…
- Dans un cours comme le nôtre sur les usages des technologies, on a vite fait de penser que les femmes sont moins habiles que les hommes avec un ordinateur et on a peut-être tendance à les accompagner de trop dans la maîtrise des outils techniques. Mais il n’y a a priori aucune raison d’agir ainsi.
- Dans les critères d’évaluation des travaux des étudiant-e-s, il serait possible d’ajouter le fait que leurs textes devraient être épicènes.
- Au-delà de la question du genre, cette réflexion nous a amenés à nous questionner de façon plus générale sur la différenciation de l’enseignement. Par exemple, dans quelle mesure notre enseignement est-il adapté à des étudiant-e-s handicapé-e-s? Tou-te-s les étudiant-e-s ont-ils/elles un accès égal à un ordinateur? etc. Se soucier de ces questions, c’est montrer aux étudiant-e-s qu’on se préoccupe de leurs difficultés potentielles et de leur personne. Cela peut contribuer à augmenter leur motivation pour notre enseignement.
Pour conclure cet article, sachez que le Centre de didactique universitaire de l’Université de Fribourg (projet e-qual) organise le 25 janvier 2010 un colloque intitulé « La perspective « genre » dans l’enseignement supérieur et l’évaluation de l’enseignement ».
Très bon article! C`est impressionant de voir le grand engagement de la FAE.
Oui, la FAE semble assez sensibilisée au sujet. Plusieurs étudiantes sont entrées récemment dans le comité d’organisation et leurs intérêts s’orientent vers de nouvelles directions. A voir sur leur site! http://www.unil.ch/fae/page64203.html
[…] enseignant-e-s universitaires aux questions de genre dans les enseignements. Il y a certainement de petites choses à entreprendre dans les cours, comme je le mentionnais au début de ce […]