Qu’il soit noir, vert ou blanc, ou même en papier, qu’on y écrive avec une craie ou un feutre, qu’il soit magnétique ou pas, c’est un outil qu’on voit partout dans les auditoires de l’enseignement supérieur. Et même si les tableaux électroniques ont fait leur apparition il y a quelques années, rien ne semble détrôner le tableau noir au hit-parade des instruments utilisés par les enseignant-e-s quand ils/elles donnent cours (avec les dias PowerPoint bien sûr…). Nous connaissons tou-te-s l’expression « aller au tableau » qui nous a donné tant de sueurs froides…
Utiliser l’ardoise et la craie pour dessiner ou écrire existe depuis des siècles. Il semble cependant que le tableau n’ait commencé à être utilisé à l’école qu’au début du 19ème, en tout cas aux Etats-Unis. De plus en plus, il est remplacé par des tableaux blancs utilisés avec des feutres effaçables, ce qui évite bien des problèmes aux personnes allergiques à la craie ainsi que les questions d’approvisionnement des classes en eau…
Mais même s’il est utilisé partout, ce n’est pas toujours évident de s’approprier cet outil pour enseigner. Écrire bien droit sur une ligne imaginaire et suffisamment grand pour les étudiant-e-s du 50ème rang, recourir aux couleurs à bon escient, gérer l’espace disponible, ne pas effacer sans que les étudiant-e-s aient pris note… et ne pas faire « crisser » sa craie, c’est tout un apprentissage.
Que ce soit en anglais ou en français, je n’ai pas l’impression que les ressources à ce sujet sont légion. Et quand elles existent, elles portent plutôt sur l’enseignement primaire que supérieur. Par contre, il y a beaucoup d’articles (dans la presse surtout) qui prédisent la mort à court terme de cet outil vu le développement des technologies comme les dias PowerPoint ou les Smart Boards… mais disons que ce n’est pas ce que j’observe à l’université.
Selon G. Voz (2008), le tableau noir peut être utilisé pour trois fonctions: la construction des connaissances, le support à la connaissance formalisée et la gestion de la dynamique du groupe. Dans l’enseignement supérieur (particulièrement pour les grands groupes), ce sont surtout les deux premières fonctions qui sont les plus utilisées. Et c’est la plupart du temps l’enseignant-e qui l’utilise…
Quelques petits conseils que je retiens de la lecture de ce texte:
- pour présenter et développer un processus scientifique, le tableau noir est un outil redoutablement efficace. Il est possible de développer pas à pas tout un raisonnement, mathématique par exemple, qui permet aux étudiant-e-s de suivre et prendre note tout en étant attentif aux explications de l’enseignant-e. La même présentation avec des dias PowerPoint attire beaucoup trop les regards et distrait les étudiant-e-s des explications données par l’enseignant-e. Et oui… c’est ce qu’ont découvert trois chercheurs américains récemment dans leur article Information retention from PowerPoint and traditional lectures (Savoy, Proctor & Salvendy, 2009).
- pour noter les réponses des étudiant-e-s à une question posée en classe et ensuite amorcer un débat, le tableau noir peut être très utile. La même chose peut être faite avec PowerPoint mais cela exige de pouvoir taper rapidement au clavier de l’ordinateur…
- quelques règles typographiques: écrire suffisamment grand et en ligne droite (demander éventuellement aux étudiant-e-s du fond s’il/elles peuvent lire), utiliser des « – » ou des « * » pour les énumérations d’idées ou de concepts, utiliser les couleurs pour écrire, souligner ou entourer les mots importants…
- il peut être utile de préciser ses règles d’usage du tableau noir en début de semestre: le tableau de gauche et celui de droite peuvent avoir des fonctions différentes (par exemple un pour les explications de concepts ou de processus et l’autre pour les synthèses, ou un pour les consignes d’exercices et l’autre pour les solutions), un code couleur peut être utilisé pour différents types de concepts, etc.
- il peut être très utile de réfléchir à l’avance à la façon dont les notes écrites au tableau seront organisées. De même, prendre un peu de recul à certains moments permet de vérifier si rien n’a été oublié ou s’il n’y a pas de faute d’orthographe.
Enfin, la lecture de l’article de Savoy, Proctor et Salvendy (2009) peut être éclairante… et surprenante! En effet, la rétention d’informations par les étudiant-e-s est, selon leur étude, de 15% meilleure lors de cours dits « traditionnels » recourant à l’usage du tableau noir que lorsque le cours est donné avec des dias PowerPoint non-animées (pour un cours à des ingénieurs). Pourtant, les étudiant-e-s préfèrent PowerPoint… Pire: ces chercheurs n’ont pas observé de différence significative du point de vue de la rétention d’information entre les étudiant-e-s qui avaient suivi le cours avec PowerPoint et ceux/celles qui ne sont pas venu-e-s au cours et qui ont juste lu le livre! Par contre, des dias PowerPoint semblent plus efficaces pour la rétention par les étudiants de schémas complexes qu’il est difficile de dessiner sur un tableau. Le gros problème observé est en fait que les étudiant-e-s ont le regard trop attiré par les dias et ne font pas assez attention aux explications orales. Et finalement, dans un cas comme dans l’autre, aménager des moments d’interactions avec l’enseignant-e ou entre étudiant-e-s semble bénéfique pour la compréhension et la rétention.
Un tout dernier conseil: à la fin d’un cours, après avoir utilisé le tableau, merci de l’effacer pour laisser place nette à l’enseignant-e qui vous suit 🙂
Savoy, A., Proctor, R. W., & Salvendy, G. (2009). Information retention from PowerPoint(TM) and traditional lectures. Computers & Education, In Press, Corrected Proof. doi: 10.1016/j.compedu.2008.12.005.
Voz, G. (2008). Le tableau noir en classe : petite présentation aux (futurs) enseignants qui se posent des questions. ISELL Sainte-Croix, Liège, Belgique.
J’ai été satisfait pour votre analyse en ce qui concerne le tableau noir mais néanmoins j’aimerais savoir plus sur mon thème « ‘UTILISATION DU TABLEAU NOIR ET DE L’ARDOISE A L’ECOLE PRIMAIRE »
Bonjour. Je ne suis pas vraiment spécialiste de l’enseignement primaire. Ce que je vous conseillerais, c’est de rechercher de l’information sur les sites consacrés à ce niveau d’enseignement comme par exemple http://www.enseignement.be ou http://www.educa.ch/dyn/12.asp
Le texte de Voz que je cite dans l’article est déjà consacré à l’enseignement primaire et j’ai adapté ses conseils à l’enseignement universitaire.
Bonne continuation!