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Posts Tagged ‘enseignant-e’

Si de plus en plus de recteur-trice-s, doyen-ne-s et enseignant-e-s universitaires s’accordent à penser que la mission d’enseignement devrait être valorisée à l’université, il faut bien admettre que les moyens mis en œuvre pour y arriver sont très variés. Citons parmi ceux-ci la formation pédagogique (longue ou courte et portant sur différents aspects du métier d’enseignant-e universitaire), le soutien financier et logistique à des projets pédagogiques, l’organisation de rencontres courtes sur différents sujets (type ateliers sur la pause de midi), ou encore la mise en place d’un prix du/de la meilleur-e enseignant-e.

M. RomainvilleDans une conférence intitulée « Pourquoi concourir à un prix de l’innovation pédagogique? » donnée à Liège en 2006, Marc Romainville avait bien résumé les enjeux d’un tel prix. Les dias de cette conférence sont accessibles à cette adresse et la présentation en vidéo à cette adresse (attention, en cliquant sur ce lien, le site vous propose de télécharger plusieurs fichiers, ce sont les dias des conférenciers; annulez simplement leur téléchargement). Un des constats de base est que les étudiant-e-s qui entrent à l’université aujourd’hui sont très différent-e-s d’il y a vingt ou trente ans. La massification de l’enseignement supérieur a profondément modifié le contexte d’apprentissage des étudiant-e-s à l’université. Pour Romainville, ceci devrait amener les universités à s’interroger sur leurs méthodes pédagogiques: les cours ex-cathedra, très efficaces pour les étudiant-e-s issu-e-s de l' »élite » intellectuelle des années 60 sont-ils encore aussi efficaces pour les étudiant-e-s d’aujourd’hui issu-e-s de milieux sociaux et culturels beaucoup plus variés? comment répondre mieux aux demandes de l’économie actuelle de former des universitaires « compétent-e-s » et « employables »? comment prendre en compte les caractéristiques des étudiant-e-s actuel-le-s qui ont un rapport aux études et des compétences méthodologiques différentes d’avant? comment lutter contre l’échec massif dans les études supérieures? Ces questions justifient l’innovation pédagogique dans l’enseignement supérieur. Or l’enseignement étant traditionnellement peu valorisé à l’université par rapport à la recherche, les autorités académiques ont élaboré plusieurs moyens pour encourager les enseignant-e-s à s’interroger sur leurs méthodes pédagogiques et à en développer de nouvelles, parmi lesquels la mise en place de prix de l’enseignement ou de l’innovation pédagogique. Ces prix participeraient au développement d’une culture de la valorisation et de la qualité de l’enseignement.

Dans beaucoup d’universités, de tels prix sont organisés. Par exemple, la Colorado State University organise chaque année, grâce à l’association des ancien-ne-s, un Best Teacher Award. Les meilleur-e-s enseignant-e-s de l’année sont élu-e-s en avril par les étudiant-e-s et les ancien-ne-s étudiant-e-s. Un autre exemple est celui de l’Université Laval à Québec qui organise annuellement un prix d’excellence en enseignement. En Suisse, une grande banque finance un Award of Best Teaching. Le processus de sélection des lauréat-e-s est effectué par les universités (la mienne n’y participe pas).

Dans l’université où je travaille, de tels prix n’existent pas (et n’existeront pas dans un avenir proche). Personnellement, je vois trois problèmes à ce type d’initiative. Bien que j’adhère à l’argumentation de Marc Romainville, je m’interroge sur cette « solution », même si ce n’en est qu’une parmi d’autres:

  1. Si l’objectif annoncé (comme c’est le cas dans mon université) est de développer à l’intérieur d’une université une culture globale de développement de la qualité et de valorisation de l’enseignement, je me demande si les prix d’excellence touchent vraiment tout le monde et si tout le monde s’y intéresse. Vu la procédure à suivre par exemple à l’Université Laval, que se passerait-il si aucun-e enseignant-e ne soumettait sa candidature? Le message à comprendre par les autorités serait simplement que personne ne s’y intéresse… Que faire dans ce cas? Ou, autre exemple, si le prix était attribué (comme c’est proposé par certaines facultés de mon université) aux enseignant-e-s qui obtiennent les meilleures évaluations de leur cours par les étudiant-e-s, que se passerait-il si tou-te-s les enseignant-e-s obtenaient des moyennes inférieures à 50%? Faudrait-il se résoudre à décerner un prix d’excellence au moins mauvais ou à la moins mauvaise des enseignant-e-s? Bref, le rapport entre l’objectif et la solution ne me paraît pas très évident.
  2. Le processus d’évaluation pour choisir le/la meilleur-e enseignant-e (d’ailleurs est-ce l’enseignant-e ou son enseignement qui est visé?) ainsi que les critères d’évaluation me paraissent dans la plupart des cas assez opaques. Ou en tout cas, il ne me semble pas que ça soit publié sur les sites des universités. Bien sûr, comme le dit Marc Romainville, trouver les critères pertinents d’un bon enseignement (ou enseignant-e?) est très difficile. Il en existe, mais peu de débat a lieu à leur sujet, alors que pour la qualité de la recherche, un certain consensus s’est dégagé pour chaque discipline. Si les critères ne sont pas connus ni débattus par les enseignant-e-s, comment pourraient-ils/elles savoir dans quelle direction diriger les innovations qu’ils/elles envisagent dans leur enseignement?
  3. Où se trouve la notion « d’apprentissage », ou de « développement professionnel » des enseignant-e-s? Est-ce qu’un prix pousse le plus grand nombre (pas juste quelques-un-e-s) à réfléchir à leurs pratiques, à chercher à améliorer leurs enseignements, à s’interroger sur l’apprentissage des étudiant-e-s? Encore une fois, je n’en ai pas l’impression.

D’autres initiatives me paraissent davantage porteuses pour développer une culture globale d’innovation et de qualité pédagogique dans les universités. Par exemple:

  • la mise en place de « portfolios d’enseignement » (ou teaching portfolios) qui visent le développement professionnel des enseignant-e-s. A l’Université catholique de Louvain, le « dossier de valorisation pédagogique » existe depuis 2000 et à l’Université de Lausanne, les rapports d’auto-évaluation des enseignant-e-s comportent un volet « enseignement » (PDF, 76 Ko) aussi conséquent que le volet « recherche ».
  • un accompagnement particulier pour les nouveaux/nouvelles enseignant-e-s, comme par exemple à la University of British Columbia. Des activités spécifiques sont organisées et peuvent être valorisées dans le portfolio personnel.
  • enfin, un système que je connais beaucoup moins et qui semble exister outre-Atlantique, c’est le peer evaluation of teaching. Un dossier y est consacré à l’Office of Faculty Development de la Western Michigan University. Plusieurs modalités pratiques sont possibles mais le principe est de collaborer entre plusieurs collègues pour évaluer les enseignements de chacun-e, par exemple sur base d’observations en classe ou d’échange de portfolios d’enseignement. Le but est de faire de la pédagogie un sujet de discussion entre enseignant-e-s universitaires et de collaborer pour se développer professionnellement.

J’en termine ici pour cet article mais je me rends bien compte que le sujet (et le débat!) est loin d’être définitivement circonscrit. En l’absence d’études sur l’impact de la mise en place de prix d’enseignement sur la qualité globale de la pédagogie à l’université, il me semble qu’il est surtout important de se poser la question du but recherché. Pour valoriser la pédagogie à l’université et promouvoir une culture de la qualité de l’enseignement, il me semble simplement que d’autres moyens sont plus efficaces à long terme.

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J’entends souvent l’expression « changer son enseignement ». Je trouve le mot « changer » un peu fort, dans le sens où cette expression pourrait vouloir dire « révolutionner » son enseignement ou « jeter l’ancien pour prendre un nouveau ». En bref, on changerait d’enseignement comme on changerait de vêtement. Bien sûr, la plupart des personnes qui utilisent cette expression ne l’utilisent pas dans ce sens et veulent plus souvent dire « adapter légèrement » ou « faire évoluer »… mais elles ne le disent pas de cette façon.

Mais que veut dire concrètement cette expression pour les enseignant-e-s eux/elles-mêmes? Que recouvre exactement pour eux/elles un « changement » de pratique d’enseignement? Un article récent de McGowan et Graham (2009) s’est penché sur cette question en allant à la rencontre de plus de 200 enseignant-e-s d’une université américaine (Brigham Young University, UT).

Ces deux auteurs sont conseillers pédagogiques dans leur université et se sont demandé ce que faisaient concrètement les enseignant-e-s pour améliorer leur enseignement lorsqu’ils/elles reçoivent leurs évaluations d’enseignement. Il faut savoir d’abord que dans cette université, l’évaluation des enseignements par les étudiant-e-s se fait via des formulaires en ligne et que les résultats (un score entre 1 et 8… (je sais que ce type de scores ont une validité assez  discutable, mais je ne vais pas entrer dans ce débat maintenant :-)…)) sont rendus accessibles aux enseignant-e-s mais aussi aux étudiant-e-s qui ont participé au cours ainsi qu’aux dirigeant-e-s de l’université.

Parmi les enseignant-e-s de leur université, les auteurs en ont sélectionné 307 qui avaient augmenté leur score de 1.5 au moins pendant 3 semestres d’affilée. Ils leur ont simplement envoyé un questionnaire leur demandant ce qui avait évolué dans leur cours pour que les résultats s’améliorent de la sorte. Sur 203 réponses reçues, les auteurs ont contacté 27 enseignant-e-s de presque toutes les facultés pour un entretien semi-dirigé.

Parmi les éléments de changement que les enseignant-e-s mentionnent, voici les 4 les plus souvent cités:

  1. Mettre en place des principes d’apprentissage actif pour les étudiant-e-s (Active/practical learning: 20% des réponses). Il s’agit le plus souvent de varier les méthodes d’enseignement en faisant davantage participer les étudiant-e-s: discussions en groupe, présentations et discussions d’exemples illustrant la théorie, expériences pratiques, etc.
  2. Développer les interactions entre l’enseignant-e et les étudiant-e-s (Teacher/Student interaction: 15% des réponses). Par « interactions », on entend ici la communication informelle ou plutôt la relation que les enseignant-e-s nouent avec leurs étudiant-e-s. Par exemple, connaître les prénoms des étudiant-e-s (même avec un grand groupe), s’intéresser à leurs projets personnels, s’informer sur leurs connaissances préalables, etc. sont des éléments de changement cités par les enseignant-e-s qu’il leur semble vraiment important à mettre en œuvre.
  3. Préciser ses objectifs pédagogiques et le niveau de ses attentes (Learning Outcomes and High Expectations: 13% des réponses). Selon les enseignant-e-s ayant participé à l’étude, plus les objectifs d’un cours et le niveau d’exigence de l’enseignant-e sont clairs, plus les étudiant-e-s se sentent encadré-e-s et les cours prennent du sens à leurs yeux. Ceci est à mettre aussi en lien avec le feedback que l’enseignant-e procure aux étudiant-e-s: plus les exigences et les objectifs sont clairs, plus le feedback sera précis et aura du sens par rapport aux apprentissages des étudiant-e-s.
  4. Préparer en participant à des activités facultaires (Faculty preparation: 12% des réponses). Participer à des séminaires de travail, enseigner plusieurs fois le même cours ou faire des lectures dans le domaine de l’enseignement supérieur sont des activités citées comme aidant à se renouveler dans ses enseignements.

Dans la discussion de leur étude, les auteurs citent encore deux choses que j’ai trouvées intéressantes. D’une part, le fait de discuter de pédagogie avec leurs collègues a permis à un certain nombre d’enseignant-e-s de développer des méthodes d’enseignement plus actives et intéressantes pour les étudiant-e-s. D’autre part, la plupart des enseignant-e-s disent avoir consacré relativement peu d’efforts pour « changer » leur enseignement. Certain-e-s disent notamment que les changements sont simples mais qu’ils font une grosse différence aux yeux des étudiant-e-s.

Selon cet article, « changer » son enseignement ne veut donc pas dire « révolutionner » tout son mode de fonctionnement. Pour les enseignant-e-s interrogé-e-s, il s’agit plutôt de petits changements très concrets qui demandent relativement peu d’efforts… et qui se traduisent apparemment par de meilleures évaluations par les étudiant-e-s.

McGowan, W., & Graham, C. (2009). Factors Contributing to Improved Teaching Performance. Innovative Higher Education, 34(3), 161-171.

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Quelques réflexions avec les participant-e-s lors de la dernière session de formation pédagogique ont porté sur la « liberté académique ». Justement, la revue British Journal of Educational Studies consacre son numéro de juin à la liberté académique des enseignant-e-s universitaires. Par ailleurs, récemment, un professeur de l’Université de Saint-Gall a vu son poste menacé suite à ses déclarations publiques sur l’évasion fiscale… et le journal qui relate l’affaire titre « Liberté académique mise à mal à l’université ». Qu’est-ce à dire exactement?

Karran (2009, p. 191) présente en quelques lignes les enjeux de cette notion:

Academic freedom is necessary as knowledge is created by challenging orthodox ideas and beliefs, which means that because of the nature of their work, academics are more naturally led in to conflict with governments and other seats of authority. Academics are responsible for many important scientific discoveries (in chemistry, medicine, etc.), and without their work, knowledge would not have advanced, and many benefits which people enjoy today would not be possible. To allow academics to challenge existing knowledge and create new ideas, they are granted academic freedom to undertake research and discuss new ideas and problems of their disciplines, and express their conclusions, through both publication and in the teaching of students, without interference from political or ecclesiastical authorities, or from the administrative officials of their institution, unless their methods are found by qualified bodies within their own discipline to be clearly incompetent or contrary to professional ethics.

Karran se réfère dans son article à la recommandation de l’UNESCO émise en 1997 à propos du personnel enseignant de l’enseignement supérieur. L’UNESCO y avait défini la liberté académique en ces termes:

L’exercice des libertés académiques doit être garanti aux enseignants de l’enseignement supérieur, ce qui englobe la liberté d’enseignement et de discussion en dehors de toute contrainte doctrinale, la liberté d’effectuer des recherches et d’en diffuser et publier les résultats, le droit d’exprimer librement leur opinion sur l’établissement ou le système au sein duquel ils travaillent, le droit de ne pas être soumis à la censure institutionnelle et celui de participer librement aux activités d’organisations professionnelles ou d’organisations académiques représentatives. Tous les enseignants de l’enseignement supérieur devraient pouvoir exercer leurs fonctions sans subir de discrimination d’aucune sorte ni avoir à craindre de mesures restrictives ou répressives de la part de l’Etat ou de toute autre source.

Concrètement, la liberté académique revêt quatre aspects fondamentaux:

  • l’autonomie de l’institution en ce qui concerne sa gouvernance et le travail académique (recherche, enseignement, service à la communauté);
  • les droits et les libertés individuels;
  • l’autogestion: le fait que les enseignant-e-s participent activement à l’organisation et à la gestion des institutions d’enseignement supérieur (conseils académiques, décanats, rectorats, etc.) est un gage de leur autonomie et de leur liberté académique;
  • la titularisation des enseignant-e-s permet de préserver leur emploi et donc de garantir leur liberté.

Karran a recherché systématiquement dans les législations des 27 pays de l’Union européenne dans quelle mesure elles étaient en phase avec la recommandation de l’UNESCO. L’adoption de celle-ci est très variable d’un pays à l’autre mais globalement, l’auteur estime le niveau d’adoption comme plus faible qu’attendu… Une première constatation est que le concept de « liberté académique » est rarement un concept défini légalement et qu’il dépend donc fortement de la culture académique des pays et institutions concernés. Le respect de la liberté académique n’est donc pas toujours facile ni garanti. Une deuxième constatation est que la recommandation de l’UNESCO est très méconnue, que ce soit par les gouvernements mais aussi par les universités elles-mêmes (et en Suisse, je n’ai pas vraiment trouvé de document fondateur…).

Mais jusqu’où cette liberté peut-elle aller? Selon Barrow (2009) qui a écrit un article dans le même numéro thématique, la liberté académique (de donner son opinion) devrait être absolue indépendamment de toute offense que cette liberté pourrait causer. Il cite une dizaine de « cas limites », par exemple celui d’un professeur anglais qui a été condamné plusieurs fois pour négationnisme. Pour Barrow, ce professeur a le droit de dire son opinion… même s’il encourt des poursuites judiciaires, qu’il est considéré par tous ses collègues comme un piètre historien et que son université aurait le droit de le mettre à pied en se questionnant sur ses compétences de chercheur…

Une petite chose que je retiens de ces lectures est que la liberté académique ne peut pas être réduite à une sorte de « super liberté d’opinion ». Cela concerne aussi le choix libre de poursuivre des recherches sur des thématiques variées, de publier, de participer à des sociétés scientifiques, etc. Dans les sociétés démocratiques, il s’agit d’une liberté importante qui aurait probablement avantage à être moins informelle et plus discutée et débattue entre les enseignant-e-s. Par exemple, quelle attitude une université devrait-elle adopter face à des « cas limites » comme celui cité ci-dessus? Quel espace de débat existe au sein des universités pour en parler? Quel cadre législatif ou en tout cas plus formel pourrait être mis en place pour garantir cette liberté et en même temps préciser ce que seraient les devoirs des enseignant-e-s du supérieur (le document de l’UNESCO en suggère)? La liberté académique, en pratique, ne se résume pas non plus à dire son opinion quand on veut mais s’exerce aussi en participant activement à la vie et à la gestion de son université ou établissement d’enseignement supérieur et en s’investissant dans des services à la communauté, que ce soit par le soutien à des projets ou des associations ou par un travail de vulgarisation de la recherche.

Barrow, R. (2009). Academic freedom: its nature, extent and value. British Journal of Educational Studies, 57(2), 178-190.

Karran, T. (2009). Academic freedom in Europe: reviewing UNESCO’s recommendation. British Journal of Educational Studies, 57(2), 191-215.

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UNIL podcastCe mardi 26 mai, avec mes collègues du Réseau Interfacultaire de Soutien « Enseignement et Technologies », nous présentions aux enseignant-e-s et assistant-e-s de l’UNIL la procédure de conseil et de production mise en place. Une vingtaine de personnes de toutes les facultés sont venues pour prendre des renseignements et poser leurs questions.

Nous avons rédigé un guide pédagogique qui est à présent disponible en ligne. Des ressources complémentaires ainsi qu’un petit quizz sont aussi à disposition.

Voici aussi les 3 exemples de podcasts que nous avons présentés pour donner quelques idées:

  • Un cours d’histologie pour les vétérinaires de l’Université de Zürich. Des photos haute définition de coupes histologiques sont commentées et annotées par l’enseignante. Chaque épisode dure entre 2 et 5 minutes. Les étudiant-e-s peuvent les utiliser pour revoir la matière vue au cours, un peu comme un atlas d’histologie, une banque de ressources consultables en ligne. Le cours est en suisse-allemand 😉 désolé, mais l’exemple est assez parlant. Ça nous a permis d’insister sur l’importance de produire de courts épisodes en complémentarité avec le cours qui se déroule en classe.
  • Le cours d’économie de Mr Danthine en HEC à l’UNIL dont la particularité est de s’adresser à 700 étudiant-e-s de BAC1… Les épisodes sont enregistrés en studio et présentent chacun une notion ou théorie assez complexe. Les étudiant-e-s sont invité-e-s ensuite à les consulter avant les cours, ils/elles peuvent aussi poser leurs questions via un forum de discussion. Vu que les étudiant-e-s ont vu la matière à l’avance, le cours est davantage basé sur des questions/réponses et des discussions. Encore une fois, la complémentarité entre le podcast et le cours en présence est mise en avant.Podcast Ethics Bites
  • Un cours d’éthique appliquée (attention ce lien s’ouvre avec le logiciel iTunes) créé par la BBC en collaboration avec l’Open University et disponible sur iTunesU. L’intérêt de cette série de podcasts est de proposer des ressources complémentaires pour des étudiant-e-s en philosophie. Plutôt que de proposer des conférences d’expert-e-s qui ne sont pas toujours bien adaptées à des cours, il s’agit plutôt ici d’interviews sur des questions précises d’éthique (le droit d’avoir un enfant, la liberté d’expression, l’utilisation d’animaux de laboratoire, etc.). Les épisodes durent entre 15 et 20 minutes et sont plus vivants et interactifs qu’une longue conférence d’une heure trente. Ces ressources peuvent aussi être mieux intégrées dans les cours de l’Open University qui a des étudiant-e-s à distance dans le monde entier.

Plusieurs personnes se sont montrées intéressées à créer des podcasts et ont déjà pris contact avec mes collègues ingénieur-e-s pédagogiques. La fin du semestre approche… créer des podcasts pour la rentrée peut être une belle activité de vacances 🙂

NB: Les deux autres articles de ce blog traitant aussi des podcasts se trouvent ici et ici.

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Parmi les nombreuses façons d’apprendre à enseigner et de développer ses compétences en la matière, il en est une qui reste relativement méconnue. Il s’agit de la réflexion personnelle à propos de sa propre façon d’enseigner. En Sciences de l’Education, depuis les travaux de Schön (1983), un large courant de recherche s’est intéressé à la façon dont les enseignant-e-s développent leurs connaissances et leurs compétences en menant une réflexion personnelle rigoureuse et systématique à propos de leur enseignement.

En particulier, Kolb (1984) a développé un modèle de l’apprentissage « expérientiel », c’est-à-dire qui se fonde sur l’expérience (professionnelle par exemple) pour aller plus loin dans l’acquisition de connaissances et de compétences. Kolb présente cette forme d’apprentissage dans le schéma suivant:

Cycle de Kolb

Ce modèle en cycle a pour but de rendre compte de la démarche de questionnement et de réflexion d’un-e enseignant-e à propos de sa pratique. L’intérêt de ce modèle pour un-e enseignant-e est qu’il relie d’une part pratique et théorie et d’autre part réflexion et action. Le cycle part de l’expérience concrète (au-dessus) à partir de laquelle un-e enseignant-e peut identifier une question ou une problématique qu’il/elle a rencontrée. Une réflexion sur cette expérience permet de l’analyser et d’identifier les éléments qui posent plus particulièrement question. De cette analyse, il est possible d’en faire une généralisation, ou une théorie personnelle qui devrait pouvoir s’appliquer à toutes, ou en tout cas à la plupart des situations semblables. Cette généralisation peut ensuite être opérationnalisée et transférée dans la pratique afin de résoudre les questions identifiées au départ.

C’est sur la base de ce schéma que nous proposons aux enseignant-e-s et assistant-e-s de travailler, que ce soit lors de la formation pédagogique que nous organisons à leur intention ou pour susciter la réflexion et la discussion quand ils/elles viennent vers nous pour un conseil. Nous avons formalisé le processus de questionnement personnel et de réflexion sous la forme de 8 questions. Celles-ci sont reprises dans ce document (PDF, 76 Ko). Je consacrerai quelques prochains articles de ce blog à une description de la façon dont j’utilise ce questionnaire avec des assistant-e-s pour la formation pédagogique, lors d’observations en classe ou pour organiser des discussions de groupe.

Kolb, D. A. (1984). Experiential Learning – Experience as the source of learning and development. Englewoods Cliffs (NJ): Prentice-Hall.

Schön, D. A. (1983). The reflective practitioner: how professionals think in action. Basic Books.

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Une petite anecdote en lien avec une de mes notes précédentes intitulée « Mon cours est-il épicène? »

Dans le cadre de la formation/réflexion pédagogique que nous organisons pour les enseignant-e-s de l’UNIL, nous distribuons un classeur présentant les contenus abordés, la description des activités et des documentations (articles, mémentos, etc.). L’illustration de couverture de cette farde est celle-ci:

Enseigner

Manifestement, il s’agit d’un enseignant expliquant quelque chose à des étudiantes (ou des assistantes). Lors de la dernière session de formation, une des participantes nous a fait remarquer que cette illustration était basée sur un fameux stéréotype: le professeur d’université aux cheveux gris donnant des explications à de jeunes étudiantes. Comme s’il n’y avait pas de professeures à l’université ou que les étudiants n’avaient pas besoin d’explications, eux 🙂

Comme tout stéréotype, nous ne nous en étions pas vraiment rendu compte… Pour la version du classeur de l’année prochaine, nous prendrons certainement des illustrations plus variées!

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En introduction d’un article écrit il y a déjà quelques années, Richard Felder, professeur en ingénierie, écrivait:

Hospitals would never require accountants to perform open-heart surgery – nor dermatologists, for that matter. If I drive across a bridge I can safely assume it was not designed by a civil engineer whose specialty was sewage treatment. We expect professionals to perform jobs for which they were trained: the idea of requiring them to perform every task in their field, regardless of their training and experience, is ludicrous and not subscribed to by any profession. Except college teaching.

Sur base de cette constatation, Felder critique essentiellement deux choses. La première est le mythe du ou de la « professeur-e super-héros/super-héroïne » qui mènerait de front une brillante carrière de chercheur-euse alliée à un « don » naturel pour l’enseignement. La seconde est la surenchère que certaines universités et facultés cherchent à imposer en organisant chaque année un teaching award décerné au ou à la meilleur-e professeur-e (sur base des évaluations par les étudiant-e-s, entre autres).

L’alternative qu’il proposait (en 1992! – publication en 1994) pour développer la qualité de l’enseignement dans les premières années des cursus (undergraduate courses) tenait essentiellement en cinq points, basés sur l’idée que des enseignant-e-s pourraient être spécifiquement en charge de ces cours:

  1. Develop and utilize innovative teaching methods, problems, projects, experiments, and case studies, and report these developments at meetings and conferences (e.g. annual and regional ASEE meetings) and in publications in the engineering education literature;
  2. Write undergraduate textbooks;
  3. Implement measures to increase the relevance of the undergraduate curriculum to engineering practice;
  4. Carry relatively heavy undergraduate teaching loads, including teaching undergraduate laboratories and design courses unless research faculty specifically request those courses;
  5. Demonstrate superior teaching performance, as measured by end-of-class student evaluations, retrospective senior and alumni evaluations, and peer evaluations.

Le développement de méthodes d’enseignement innovantes, l’évaluation systématique des cours… les dossiers ou portfolios d’enseignement, la mise en oeuvre de soutiens spécifiques pour le développement de projets pédagogiques, la reconnaissance de ces projets au même titre que les projets de recherche, la promotion de la formation et de la réflexion pédagogique, sont tous (ensemble, pas séparément) des facteurs de réussite pour le développement de la pédagogie à l’université.

Ceci peut paraître assez trivial maintenant que nous sommes en 2009, c’est vrai, mais au moins c’est écrit et expliqué avec humour dans l’article:

Felder, R. M. (1994). The myth of the superhuman professor. Journal of Engineering Education, 82(2), 105-110.

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Qu’il soit noir, vert ou blanc, ou même en papier, qu’on y écrive avec une craie ou un feutre, qu’il soit magnétique ou pas, c’est un outil qu’on voit partout dans les auditoires de l’enseignement supérieur. Et même si les tableaux électroniques ont fait leur apparition il y a quelques années, rien ne semble détrôner le tableau noir au hit-parade des instruments utilisés par les enseignant-e-s quand ils/elles donnent cours (avec les dias PowerPoint bien sûr…). Nous connaissons tou-te-s l’expression « aller au tableau » qui nous a donné tant de sueurs froides…

Utiliser l’ardoise et la craie pour dessiner ou écrire existe depuis des siècles. Il semble cependant que le tableau n’ait commencé à être utilisé à l’école qu’au début du 19ème, en tout cas aux Etats-Unis. De plus en plus, il est remplacé par des tableaux blancs utilisés avec des feutres effaçables, ce qui évite bien des problèmes aux personnes allergiques à la craie ainsi que les questions d’approvisionnement des classes en eau…

Mais même s’il est utilisé partout, ce n’est pas toujours évident de s’approprier cet outil pour enseigner. Écrire bien droit sur une ligne imaginaire et suffisamment grand pour les étudiant-e-s du 50ème rang, recourir aux couleurs à bon escient, gérer l’espace disponible, ne pas effacer sans que les étudiant-e-s aient pris note… et ne pas faire « crisser » sa craie, c’est tout un apprentissage.

Que ce soit en anglais ou en français, je n’ai pas l’impression que les ressources à ce sujet sont légion. Et quand elles existent, elles portent plutôt sur l’enseignement primaire que supérieur. Par contre, il y a beaucoup d’articles (dans la presse surtout) qui prédisent la mort à court terme de cet outil vu le développement des technologies comme les dias PowerPoint ou les Smart Boards… mais disons que ce n’est pas ce que j’observe à l’université.

Selon G. Voz (2008), le tableau noir peut être utilisé pour trois fonctions: la construction des connaissances, le support à la connaissance formalisée et la gestion de la dynamique du groupe. Dans l’enseignement supérieur (particulièrement pour les grands groupes), ce sont surtout les deux premières fonctions qui sont les plus utilisées. Et c’est la plupart du temps l’enseignant-e qui l’utilise…

Quelques petits conseils que je retiens de la lecture de ce texte:

  • pour présenter et développer un processus scientifique, le tableau noir est un outil redoutablement efficace. Il est possible de développer pas à pas tout un raisonnement, mathématique par exemple, qui permet aux étudiant-e-s de suivre et prendre note tout en étant attentif aux explications de l’enseignant-e. La même présentation avec des dias PowerPoint attire beaucoup trop les regards et distrait les étudiant-e-s des explications données par l’enseignant-e. Et oui… c’est ce qu’ont découvert trois chercheurs américains récemment dans leur article Information retention from PowerPoint and traditional lectures (Savoy, Proctor & Salvendy, 2009).
  • pour noter les réponses des étudiant-e-s à une question posée en classe et ensuite amorcer un débat, le tableau noir peut être très utile. La même chose peut être faite avec PowerPoint mais cela exige de pouvoir taper rapidement au clavier de l’ordinateur…
  • quelques règles typographiques: écrire suffisamment grand et en ligne droite (demander éventuellement aux étudiant-e-s du fond s’il/elles peuvent lire), utiliser des « – » ou des « * » pour les énumérations d’idées ou de concepts, utiliser les couleurs pour écrire, souligner ou entourer les mots importants…
  • il peut être utile de préciser ses règles d’usage du tableau noir en début de semestre: le tableau de gauche et celui de droite peuvent avoir des fonctions différentes (par exemple un pour les explications de concepts ou de processus et l’autre pour les synthèses, ou un pour les consignes d’exercices et l’autre pour les solutions), un code couleur peut être utilisé pour différents types de concepts, etc.
  • il peut être très utile de réfléchir à l’avance à la façon dont les notes écrites au tableau seront organisées. De même, prendre un peu de recul à certains moments permet de vérifier si rien n’a été oublié ou s’il n’y a pas de faute d’orthographe.

Enfin, la lecture de l’article de Savoy, Proctor et Salvendy (2009) peut être éclairante… et surprenante! En effet, la rétention d’informations par les étudiant-e-s est, selon leur étude, de 15% meilleure lors de cours dits « traditionnels » recourant à l’usage du tableau noir que lorsque le cours est donné avec des dias PowerPoint non-animées (pour un cours à des ingénieurs). Pourtant, les étudiant-e-s préfèrent PowerPoint… Pire: ces chercheurs n’ont pas observé de différence significative du point de vue de la rétention d’information entre les étudiant-e-s qui avaient suivi le cours avec PowerPoint et ceux/celles qui ne sont pas venu-e-s au cours et qui ont juste lu le livre! Par contre, des dias PowerPoint semblent plus efficaces pour la rétention par les étudiants de schémas complexes qu’il est difficile de dessiner sur un tableau. Le gros problème observé est en fait que les étudiant-e-s ont le regard trop attiré par les dias et ne font pas assez attention aux explications orales. Et finalement, dans un cas comme dans l’autre, aménager des moments d’interactions avec l’enseignant-e ou entre étudiant-e-s semble bénéfique pour la compréhension et la rétention.

Un tout dernier conseil: à la fin d’un cours, après avoir utilisé le tableau, merci de l’effacer pour laisser place nette à l’enseignant-e qui vous suit 🙂

Savoy, A., Proctor, R. W., & Salvendy, G. (2009). Information retention from PowerPoint(TM) and traditional lectures. Computers & Education, In Press, Corrected Proof. doi: 10.1016/j.compedu.2008.12.005.

Voz, G. (2008). Le tableau noir en classe : petite présentation aux (futurs) enseignants qui se posent des questions. ISELL Sainte-Croix, Liège, Belgique.

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La question peut paraître surprenante mais le dossier qu’educa.ch consacre à ce thème est très documenté. L’objectif du dossier est le suivant:

A côté de la famille, l’école est un pilier de la socialisation des individus. En ce qui concerne le genre, elle peut reproduire les différences ou au contraire œuvrer à les réduire. L’objectif de ce dossier est de donner aux enseignants et enseignantes des outils pour aller dans ce sens.

Et la problématique, que ce soit du point de vue de l’enseignement ou de celui de toute la société est présenté comme suit:

  • Le genre est un rapport social construit qui comme d’autres rapports sociaux par exemple la classe, la nationalité ou l’âge structure la société et la hiérarchise en attribuant aux hommes et aux femmes une position et des rôles différents.
  • Les différences et les inégalités (juridiques, sociales et économiques) entre les femmes et les hommes ne sont donc pas naturelles, mais le résultat de facteurs sociaux. Elles trouvent leur fondement aussi bien dans l’éducation et la socialisation des individus, les expériences rencontrées dans la vie de tous les jours, que dans l’organisation sociale et économique de l’État.
  • Le genre est également un outil d’analyse qui montre comment la différence sexuelle et les inégalités entre les hommes et les femmes sont historiquement construite et comment elles se reproduisent.
  • La place et les rôles différents assignés aux hommes et aux femmes ont une importance et s’expriment dans tous les domaines de la société. Le genre est donc une question transversale et s’articule avec les autres rapports sociaux.

Gender equalityVu de cette façon, il me semble que les enseignant-e-s ont un rôle à jouer pour diminuer les inégalités. Bien sûr, d’autres inégalités existent comme celles qui touchent les personnes handicapées, étrangères ou âgées. Mais il faut bien commencer par quelque part 🙂 Et le dossier d’educa.ch montre que s’intéresser aux inégalités hommes-femmes, c’est aussi prendre en compte les autres types d’inégalités.

Mais de quoi s’agit-il? Et concrètement, qu’est-ce que ça change dans un cours? Rendre un cours épicène, c’est travailler sur plusieurs plans:

  • les documents de cours: est-ce que le langage utilisé s’adresse autant aux hommes qu’aux femmes? Ceci n’est pas qu’une question de grammaire 🙂 Même si en français, « le masculin l’emporte sur le féminin », comment puis-je faire pour que les hommes et les femmes sentent que je m’adresse à eux/elles de la même façon?
  • les stratégies d’enseignement: si j’organise des travaux de groupe, comment faire pour que les hommes et les femmes aient l’occasion de participer de la même façon? si j’introduis l’usage des technologies dans mon cours (une plate-forme d’enseignement à distance par exemple), est-ce que tous les étudiant-e-s y ont accès de façon égale? pour la présentation orale de travaux de groupe, comment faire pour que ce ne soient pas toujours les hommes qui se mettent en valeur? lors de discussions-débats, les femmes ont-elles autant la parole que les hommes? etc. Ces questions peuvent surprendre mais quand on s’y attarde un peu, elles peuvent aider à faire évoluer un cours.
  • le langage utilisé et les relations avec et entre les étudiant-e-s: est-ce que mon langage est épicène quand je m’adresse aux étudiant-e-s? est-ce que tout le monde à l’occasion de participer de façon égale dans mon cours?

Pour aider à trouver des réponses à toutes ces questions et à développer des solutions, le dossier propose une grille d’évaluation pratique. Dans un prochain article, je parlerai de mon expérience personnelle à propos d’un de mes cours « Usages des technologies pour l’enseignement et l’apprentissage » dans lequel nous avons été amenés, avec mon collègue, à réfléchir à toutes ces questions et à adapter l’ensemble de nos choix pédagogiques.

Mais une question me reste toujours: pourquoi est-ce que ce sont (presque) toujours des femmes qui s’intéressent à ces questions? Les hommes ne sont-ils pas capables de se poser ce genre de questions par eux-mêmes? Changer les mentalités et les pratiques à leur sujet prennent du temps. Et ce n’est pas dévalorisant pour les hommes de se les poser 🙂

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En juillet 2007, sous le titre « La pédagogie universitaire reste à rénover« , Gilles Pinte signait une carte blanche dans Le Monde où il soulignait les changements actuels que vivent les universités et en particulier leurs publics. La massification actuelle des études universitaires semble différente de celle observée dans les années 70. Les étudiant-e-s ne sont plus des « héritier-ère-s » dans le sens de Bourdieu, mais des pionnier-ère-s, dans le sens où ils/elles sont de plus en plus souvent les seul-e-s de leur famille où de leur entourage à tenter l’expérience universitaire. Gilles Pinte analyse ainsi les nouveaux publics d’étudiant-e-s à l’université et fait un constat plutôt défavorable à la pédagogie « traditionnelle »:

[…], beaucoup d’enseignants-chercheurs à l’université estiment que le fait d’enseigner suffit à ce que les étudiants apprennent. Est-ce le cas dans les amphis bondés de première année de droit ou de psychologie ? Il n’y a rien de moins interactif qu’un cours d’amphi. L’enseignement traditionnel basé sur la transmission de savoirs vers des publics homogènes d’étudiants ne va plus de soi lorsque l’hétérogénéité des profils scolaires se retrouve à l’université. Même pour un groupe d’étudiants provenant d’une même filière de baccalauréat, les motivations, les origines sociales et culturelles, les domaines d’intérêt sont très variables.

L’auteur propose finalement de s’interroger sur les méthodes pédagogiques à l’université en suggérant d’introduire le travail par projets ou le monitorat entre étudiant-e-s.

Plus que l’article lui-même, les commentaires postés par les lecteurs sont assez révélateurs de l’état d’esprit assez dubitatif qui règne autour de la pédagogie à l’université. Je reprends ici quelques exemples qui sont emblématiques de la plupart des idées reçues qui circulent à son propos et que j’entends assez souvent:

Au lycée les programmes ont été fortement allégés; dans certains secteurs géographiques les copies du bac sont souvent surnotées. Les gamins arrivent à l’université avec des lacunes, sans savoir s’organiser alors que l’encadrement y étant faible, c’est essentiel.

Opinion assez classique qui consiste à reporter la faute sur l’enseignement qui a précédé l’université. Faut-il encore rappeler que l’enseignement secondaire n’a pas pour but unique de préparer à l’enseignement supérieur? Il s’agit surtout d’une solide formation de base dans de nombreux domaines de connaissances qui privilégie aussi le développement de méthodes d’étude et de travail personnel. Voici par exemple le plan d’étude de l’école de maturité du canton de Vaud (PDF, 497k) (cela correspond plus ou moins au bac français sauf qu’ici, c’est de l’école post-obligatoire). Dire que c’est la faute au prédécesseur est assez facile, cela permet en général de ne pas avoir besoin de faire d’examen de conscience 🙂

A-t-on vraiment besoin, à l’Université, de « pédagogues » pour prendre les étudiants par la main ? Une personne qui connaît son domaine et qui sait répondre aux questions qu’on lui pose suffit pour un public majeur, non ?

Autre opinion très classique, avec celle du « on a toujours fait comme ça » et celle du « moi, je n’ai pas eu besoin de pédagogie pour réussir mon doctorat ». Ma réponse est non bien sûr. On ne peut plus se contenter de juste connaître sa matière, vu l’hétérogénéité actuelle des publics d’étudiant-e-s. Les personnes qui affirment cela ne se rendent en général pas compte qu’elles sont des exceptions: seul-e-s environ 5% des étudiant-e-s d’une classe de 1ère BAC arrivent au doctorat, encore moins deviennent enseignant-e-s à l’université… L’immense majorité des étudiant-e-s que nous avons actuellement en face de nous n’ont pas du tout cette ambition et n’ont pas les facilités d’apprentissage de ces 5%. En plus, les pouvoirs publics qui financent les universités n’ont pas pour but que seul-e-s quelques-un-e-s fassent un doctorat… mais que le plus possible obtiennent un diplôme. Et comme nous sommes tou-te-s d’accord pour dire qu’il ne faut pas baisser le niveau universitaire, je pense que la pédagogie peut être un bon moyen pour y arriver.

Evolution des publics étudiants certes, mais inadaptation voire médiocrité d’un certain nombre d’enseignants(?) chercheurs(?), recrutés trop souvent par népotisme plus que sur leurs compétences et dépourvus parfois des connaissances fondamentales qu’ils sont censés transmettre.

Encore un lieu commun: les profs sont nul-le-s et ne s’occupent que de leurs recherches. Je dirais que c’est possible dans les universités qui ne valorisent pas l’enseignement mais axent leur recrutement uniquement sur les CV de recherche. Il me semble que c’est en train de changer petit à petit. L’évaluation des enseignements, la valorisation des expériences pédagogiques au même (oui oui) titre que l’expérience de recherche pour le recrutement et les nominations des enseignant-e-s, la constitution de fonds pour encourager les innovations pédagogiques, l’organisation de réflexions régulières avec les enseignant-e-s sur des thématiques pédagogiques ou la formation (oui oui) pédagogique sont à mon avis des moyens pour répondre à ces opinions encore très répandues.

Une lecture complémentaire qui éclaire assez bien le changement de public que connaît l’université, c’est l’introduction par Marc Romainville de l’ouvrage collectif « La pratique enseignante en mutation à l’université« .

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Voici un sujet bien délicat… 🙂 L’objet de cet article est simplement de mentionner le petit tableau comparatif cité dans la définition de Professor de l’encyclopédie Wikipedia qui cite un rapport de l’association allemande des professeur-e-s d’université (Deutscher Hochschulverband – DHV). On y apprend par exemple que les salaires des professeur-e-s américain-e-s sont les plus élevés du monde mais que les suisse-sse-s ne sont pas si loin.

En Communauté européenne, étonnamment, le Portugal tient le haut du classement et la Suède plutôt le bas… Le salaire n’accompagne pas non plus nécessairement le prestige de la fonction… regardez les chiffres français…

Mais comme le mentionne justement l’auteur de l’article, ces chiffres sont très difficilement comparables dans la mesure où les missions des professeur-e-s peuvent être très différentes d’un pays à l’autre (ou… d’un canton à l’autre!) et que les prestations sociales et impôts sont aussi très différents d’un pays (ou d’un canton!) à l’autre.

Plus intéressant est de consulter l’article Professur (en allemand). Une large section de cet article est consacrée à l’égalité homme/femme parmi les professeur-e-s d’université… En Suisse, en 2006, 9,2% des Professeurs étaient des Professeures, selon l’article Wikipedia. 14% selon la CRUS (Conférence des Recteurs des Universités Suisses), avec un objectif de 25% en 2012.

Question subsidiaire: y a-t-il égalité dans les salaires des Professeurs et des Professeures? Ca, l’histoire ne le dit pas. Mais je reviendrai sur ce sujet de temps en temps!

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Tomorrow’s Professor est à la base une liste de diffusion produite par le Center for Teaching and Learning de l’Université de Standford. Créée il y a plus de 10 ans, elle rassemble aujourd’hui plus de 25,ooo abonné-e-s de 108 pays, bien plus si l’on compte les abonné-e-s par fil RSS (dont je suis). Plus de 930 articles ont déjà été diffusés. Les articles portent sur des thématiques liées à l’enseignement et/ou l’apprentissage à l’université de façon large:

  • la recherche en pédagogie universitaire
  • la carrière académique
  • le métier d’enseignant-e, de doyen-ne, de directeur-trice de département
  • l’apprentissage des étudiant-e-s
  • la vie universitaire
  • etc.

Chaque article, long d’environ 1500-2000 mots porte sur une question particulière. Parmi les plus récents, on trouve par exemple:

Le grand intérêt que je vois dans cette liste/blog est le fait que la grande majorité des articles est basée sur des témoignages d’enseignant-e-s- Enseignant-e-s américain-e-s, certes, mais dont les questions rencontrent assez fortement les questions d’autres enseignant-e-s d’autres pays.

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